Réalisé pour le Pavillon chrétien d'Expo 67, Le huitième jour est un film-collage expérimental avant-gardiste. Il fait écho à la conscience de la contre-culture caractéristique des années 1960.
Le huitième jour s’inscrit dans la lignée des films de found footage et de collage qui utilisent des images d’archives apocalyptiques : guerres, désastres, catastrophes, bombes atomiques et nucléaires. C’est ce que l’historien du cinéma William Wees appelait « recycled images » (images recyclées), soit des films ayant recours à des procédés de compilation, de collage et d’appropriation. Le film de Gagnon propose une critique virulente des technologies militaires, de la violence et de la culture de consommation d’après-guerre par le biais d’un montage de séquences d’actualités et d’extraits filmiques reflétant la culture populaire de l’époque. L’auto-immolation d’un moine bouddhiste vietnamien - faite au nom de la paix - agit comme un contrepoint, acte ultime de protestation et de résistance contre la Guerre du Vietnam. Le film de Gagnon a initialement été présenté dans le pavillon chrétien de l'Expo 67, rien de moins ! Se terminant dans l’immobilité dévastatrice d’une explosion atomique, le film montre comment la pellicule a su capter les aspirations, les craintes et les contradictions de la période mouvementée de la fin des années 1960.
Monika Kin Gagnon
Professeure en communication à l'Université Concordia
Fille de Charles Gagnon
Charles Gagnon est un artiste multidisciplinaire québécois (1934-2003). Peintre, photographe et cinéaste, il construit une œuvre originale, complexe, d'une remarquable cohérence et majeure dans l'histoire de l'art québécois et canadien. Entre 1955 et 1960, Charles Gagnon vit, étudie et travaille à New York. Au cours de ces années, il poursuit avec régularité son travail de peintre et de photographe. De retour à Montréal, parallèlement à sa peinture, il entreprend collages et boîtes-constructions ; c'est la période dite des « paysages ». Son travail prend ensuite un caractère plus expérimental où Gagnon explore, entre autres, le contraste des surfaces, les matériaux et la relation peinture/sculpture. C'est à ce moment qu'il réalise un projet de sérigraphies, de même qu'il s'intéresse au son, à travers la réalisation de collages sonores. Finalement, il aborde le cinéma expérimental et réalise trois films (dont Le huitième jour (1966), présenté au programme du Pavillon chrétien d'Expo 67, bâtiment dont il assure la conception par ailleurs). Il poursuit ensuite sa production en peinture et en photographie. En 2002, Charles Gagnon reçoit un prix du Gouverneur général en arts visuels et en arts médiatiques.